Archéologie du village de Horbourg : l'époque gallo-romaine

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Horbourg durant l'Antiquité

L'environnement du site

Caractéristiques géographiques

Horbourg se trouve sur une butte de gravier d'origine naturelle mais dont le relief semble avoir été accentué dès l'époque romaine comme l'attestent les remblais observés dans les stratigraphies relevées au centre du village, parfois sur plus de 4 m d’épaisseur.

Cette localisation permettait de répondre aux contraintes liées à l'omniprésence de l'eau.

Une nécessité de protection contre les inondations quand on sait que le site se trouve au confluent des cours anciens de l'Ill et de la Thur auxquels se rajoutaient la Lauch et la Fecht à l'époque romaine. Cette situation était encore accentuée par l'existence de bras secondaires de ces rivières dont aucun relief ne venait entraver la divagation.

L'implantation du site devait en outre se justifier par la possibilité de franchissement, quasiment à gué, en amont du regroupement de l'ensemble de ce réseau fluvial donnant un aspect marécageux à toute cette zone. L'étymologie médiévale de Horbourg, « Horoburc », peut se traduire par "château des marécages". Cette possibilité de franchissement Est-ouest des rivières a d'ailleurs été utilisée, sans doute dès l’époque gauloise, pour l’axe de communication terrestre reliant les cols vosgiens (Col du Bonhomme ?) au passage du Rhin au niveau de Breisach.

Une défense simplifiée par le passage, à l'époque romaine, de tout ou partie de l'Ill à l'Est du site et donc du village actuel. De ce fait Horbourg pouvait présenter l'aspect d'une presqu’île justifiant l'implantation d'un castellum dans les périodes troublées de la fin de la période concernée.

Cette situation privilégiée était encore confortée par la possibilité de navigation sur l'Ill à partir de cet endroit (le Ladhof au Moyen-Age constitue le « port » colmarien sur l’Ill).

Qualités agronomiques du terroir et matières premières

A ces caractéristiques géographiques, il convient de rajouter les spécificités physiques du sol. En effet, les limons alluviaux sont propices à une utilisation agricole des terrains, attestée par la présence d'établissements ruraux gallo-romains nombreux aux environs du site. Cette activité agricole nous est connue par la présence de faubourgs périurbains qui comportent des activités artisanales de transformations des produits agricoles (meunerie et tannerie attestées à l’emplacement du lotissement du Kreuzfeld-Est fouillé en 2008).

Quels étaient les types de cultures pratiqués ? l’archéologie, et en particulier la carpologie (étude des graines), met en évidence une large polyculture et une dominante de céréales et de prairie.

La vigne y avait-elle sa place ? C’est ce que le laisse supposer un bas-relief découvert en 1782 représentant sur une de ses faces deux génies ailés foulant une hotte et tenant des grappes de raisin, mais aussi la découverte en 2008 de pépins abondants et d’une serpette de vigneron.

Comment était organisé le territoire agricole ? était-il cadastré rigoureusement comme dans d'autres régions de l’Empire ? question parmi d'autres, qui restent encore sans réponses.

De plus deux principaux types d'artisanat ont été mis en évidence, la poterie et la métallurgie. Il s'agit d'activités grandes consommatrices de bois. Cela laisse supposer l'existence, à proximité, d'importants massifs forestiers fournissant également le bois d'oeuvre pour les constructions.

Le sous-sol, quant à lui, regorge d'argile. Il s'agit d'une matière première d'importance pour la construction des maison en torchis comme on en rencontre sur l'ensemble du site. Elle va également favoriser l'installation de potiers, activité qui va perdurer jusqu'au XIXe siècle sous la forme de tuileries.

Le gravier est également extrait sur place. Par contre la pierre provient des collines sous-vosgiennes, notamment le grès et le calcaire. Utilisé pour la sculpture et les stèles funéraires en raison de la finesse de son grain, le grès rose de la région de Voegtlinshoffen a été largement utilisé alors que le calcaire semble réservé aux moellons et à la voirie.

Les voies de communication

Notre connaissance des axes de circulation au niveau local reste à ce jour extrêmement limitée.

Pourtant, nombreux sont les chercheurs qui, depuis le XVIIe siècle, ont multiplié, par des méthodes diverses et variées, les propositions de tracés plus ou moins fantaisistes. Aucune synthèse fiable n'existe à ce jour. De même aucune différence n'est faite entre les simples chemins de proximité et les voies de première importance, civiles ou militaires.

Pour Horbourg-Wihr, les différentes observations ont permis de reconnaître ponctuellement :

  • une voie se dirigeant vers le Nord à l'ouest du cimetière de Horbourg. Elle a été découverte au XIXe siècle et reconnue en 1992 par le diagnostic archéologique du Kreuzfeld-ouest sur quelques centaines de mètres. Son importance n'a cependant pas pu être précisée. Il n'est donc pas possible de savoir si son tracé se limite à l'agglomération, s'il se dirige vers le lieu où l'Ill devenait navigable ou s'il se prolonge plus avant vers le Nord.
  • une voie de première importance, reconnue en 1994, se dirige vers l'Est, en droite ligne vers le site antique de Biesheim-Oedenbourg.
  • cette voie devait avoir son pendant à l'ouest de Horbourg vers les Vosges. Mais son tracé est hypothétique bien qu'une mention pouvant s'y rapporter soit faite par Herrenschneider.
  • une voie est signalée, direction sud, à la sortie du castellum à la fin du XIXe siècle. Mais là encore, aucune précision sur ses caractéristiques.
  • une voie, se dirigeant vers le Nord-Est par Wihr vers Jebsheim et la "voie du Rhin". Cette voie a été mise au jour en 2008, dans le faubourg du Kreuzfeld-Est.

L’image qui se dégage est donc celle d’une agglomération avec un plan en étoile avec au moins cinq branches, avec des quartiers bordant les principales voies d’accès, terrestres ou fluviales. Par contre la voirie interne demeure encore difficile à représenter.

Le statut et l’extension de l'agglomération

Par l'épigraphie, en l'occurrence une inscription connue depuis 1816, nous savons qu'Horbourg-Wihr est qualifié de vicus.

Ce terme latin générique recouvre cependant des disparités très grandes, et n'indique pas avec précision le statut juridique du site. Dans le cadre actuel de nos connaissances, il est plus judicieux de qualifier le site d'agglomération. Horbourg était vraisemblablement  une des grandes agglomérations qui structuraient le territoire des Rauraques, dont la capitale était située non loin de Bâle, à Augusta Raurica.

La quasi totalité de l'agglomération gallo-romaine est à la fois recouverte par des alluvions naturelles de crues de l’Ill et par l’urbanisation actuelle. Nous n'avons à notre disposition, pour évaluer l'étendue du site, que des informations ponctuelles fournies par les sondages archéologiques, et les observations de surface.

Cependant si nous ne connaissons pas ses limites exactes, on peut, en rassemblant toutes ces données, estimer la surface totale de la ville romaine à 70-80 ha, ce qui la place parmi les agglomérations majeures au niveau régional.

Les phases civiles de l'occupation gallo-romaine

l'implantation

On peut situer l'implantation romaine à Horbourg-Wihr au début du premier siècle de notre ère d'après les témoignages archéologiques. Il semble que l'occupation du site soit le fait de civils et non de militaires comme le laisserait supposer un emplacement de cette importance. Cependant tous les secteurs du site ne sont pas encore reconnus et une implantation militaire demeure possible au premier siècle.

Dans la zone centrale de la ville les couches les plus anciennes remontent aux années 20-40 de notre ère (fouille rue des Ecoles 1998-1999).

Cette importance de l'occupation du site pour le premier siècle est confirmée par les investigations du secteur de la nouvelle mairie (1993) qui ont livré des bâtiments et un atelier de fondeur dont les rejets sont bien datés, mais aussi par les différentes fouilles récentes des faubourgs (2008-2009).

Ainsi, au Ier siècle, l'agglomération semble déjà assez importante en superficie et regroupe déjà de nombreuses activités artisanales.

le développement d'un bourg commercial et artisanal

A la fin du Ier siècle, la frontière a été déplacée du Rhin vers l'Est de la Forêt Noire après la conquête des Champs Décumates. De ce fait l'Alsace se trouve à l'abri d'une frontière éloignée dorénavant de plusieurs dizaines de kilomètres. L'agglomération connaît alors, pendant les deux premiers tiers du IIe siècle, un essor important signalé par la couche archéologique la plus riche en mobilier et des activités artisanales plus intenses.

On y voit des bâtiments construits avec plus de soin et de recherche de prestige comme en témoignent les portiques bordant certaines voie. Se révèlent ainsi un certain niveau de richesse mais également une pénétration des modes de construction de l'architecture romaine. Les constructions, du moins celles qui ont pu être relevées, demeurent de facture locale, en bois et torchis.

Au centre de l'agglomération (Jardin Ittel - rue des Ecoles), le bâtiment, que Herrenschneider avait pris en 1884 pour le praetorium du camp, date en réalité des années 180-220 ap. J.-C.  et serait, d’après la fouille de 2004, un temple monumental ou à défaut un édifice public, construit en belle maçonnerie régulière et entouré probablement d'une colonnade.

A peu de distance, Charles Bonnet a dégagé en 1972 une partie d'un bâtiment contemporain, remanié au IIIe siècle, également en pierres, pourvu d'un système de chauffage (hypocauste) qui pourrait appartenir à un complexe thermal.

L'activité artisanale est marquée par la présence d'un atelier de potier (à l'emplacement du collectif d'habitations Les Pivoines et du Crédit Mutuel - rue de la 5ème Division Blindée). Cet atelier fabriquait de la céramique commune entre 120 et 160 ap. J.C. A proximité se trouvait un atelier de bronzier, peut-être en rapport avec les découvertes effectuées à une trentaine de mètres de là, à l'emplacement de la nouvelle mairie. Une couche d'inondation du dernier quart du IIe siècle recouvre l'ensemble, marquant ainsi la fin des activités en ce lieu. A côté de l'atelier de bronzier, on trouve une voie empierrée qui paraît contemporaine.

On retrouve des traces d'aménagement de voirie et des vestiges d'habitats de la même période à une centaine de mètres au nord, à côté de l'église protestante.

Il semble donc qu'il y ait eu, au IIe siècle, une véritable volonté d'aménagement de l'espace avec une réorganisation du réseau de voirie interne.

A partir IIIe siècle, les vestiges deviennent de plus en plus rares. L'âge d'or de l'agglomération civile est terminé, des incursions barbares ont lieu mais n'expliquent pas tout. Il semble qu'il y ait eu également un changement climatique provoquant une montée du niveau de la nappe phréatique et la multiplication des crues. Les inondations devaient constituer le point sensible de la pérennité de l’habitat sur le site, recouvrant de leurs dépôts alluviaux les niveaux archéologiques.

La déchéance de l'agglomération civile (IIIe et IVe siècles)

Le IIIe siècle se caractérise par l'extrême pauvreté mobilière des découvertes et la quasi absence de structures d'habitat. Seul le centre du site est encore occupé de manière évidente avec le réaménagement de bâtiments préexistants On retrouve des traces après 250 ap. J.-C. mais ce sont essentiellement des monnaies, surtout des empereurs usurpateurs gaulois, la céramique étant rare.

Pour le IVe siècle, on retrouve uniquement des monnaies pour tout mobilier mais la méconnaissance actuelle de la céramique de cette période peut nous occulter des aspects inédits de l'occupation du site.

L'abondance des monnaies pour ces dernières périodes est liée à l'inflation monétaire de l'époque, les découvertes ne concernant pratiquement que des monnaies de bronze de petit module, ce qui modère l'estimation proportionnelle au nombre de monnaies.

Le retour de la frontière de l'empire romain sur le Rhin, du fait de l'abandon du limes germano-rhétique en 259/260, avait rendu un rôle éminemment stratégique à notre site. C'est pourquoi on assiste à l'édification d'un camp militaire (castellum), verrou sur ce carrefour stratégique de voies de communication.

Cette fortification marque une étape importante pour l'histoire de notre site car, après un quasi abandon de presque deux siècles, il va retrouver, pour un temps encore mal défini, une position de première importance dans le schéma stratégique de défense du Rhin supérieur.

Quel nom pour cette ville gallo-romaine : Argentovaria ?

Depuis le 16e siècle, la majorité des historiens estime que la ville de Horbourg pouvait prétendre à la dénomination d’Argentovaria, toponyme latin qui figure dans plusieurs sources datant de l’Antiquité (itinéraires routiers, recueil de géographie des Gaules, traités historiques…) et qui doit être placé en centre Alsace, à hauteur de Colmar, entre l’Ill et le Rhin. Toutefois, de nombreuses polémiques se sont développées, au fur et à mesure que de nouveaux sites antiques étaient mis au jour en Centre Alsace au cours du 19e siècle. Aujourd’hui, un seul autre prétendant sérieux peut prétendre rivaliser avec Horbourg. Il s’agit de Biesheim-Oedenbourg, site gallo-romain majeur situé en bordure du Rhin, qui s’est développé autour de campements légionnaires.

Quoiqu’en disent les partisants de chaque camp, sans découverte déterminante, une inscription par exemple, il n’est pas possible de départager objectivement Horbourg sur l’Ill ou Oedenbourg sur le Rhin pour attribuer à l’un ou l’autre le nom de la ville d’Argentovaria, Cette question demeurera donc ouverte.

L'activité économique

Mis à part le domaine agricole pour lequel nous manquons d'éléments, c'est l'artisanat qui, au vu de nos connaissances, représente l'activité principale du vicus.

L'activité la plus intense, recensée à ce jour, est la production de céramique. La découverte de l'atelier de potier en 1967 eut lieu lors de travaux qui n’ont pas permis une fouille correcte des vestiges. Ce site recelait des dizaines de poteries intactes dont quelques unes sont conservées au musée d’Unterlinden.

Il faut noter également que furent retrouvés au même endroit des fragments de deux moules à sigillée. La présence de ces deux moules fragmentaires ne doit pas être considérée comme accidentelle, d'autant qu'ils ont été trouvés dans un contexte d'atelier de potier. Il semble bien qu'il y ait eu à Horbourg-Wihr une tentative de production de céramique sigillée, céramique de luxe. A ce jour aucun tesson issu de ces moules n'a été découvert, ce qui laisse penser que la tentative s'est interrompue avant son terme. Mais les données sont trop lacunaires pour juger de l'état d'avancement de cette tentative.

La deuxième activité artisanale recensée est la métallurgie. Plusieurs traces prouvent qu'il s'agissait là d'une activité importante. On a en effet retrouvé des éléments liés à cette activité dans trois secteurs. Le premier endroit était proche de l'atelier du potier et livra, en 1968, un atelier avec son four ainsi que de nombreuses scories, objets en bronze (fibules et une statuette de Mercure) et un creuset.

 Le second endroit, à l'emplacement de la nouvelle mairie, a livré plusieurs creusets et des scories contenant du bronze. Ce secteur est certainement en relation directe avec le premier car la distance qui les sépare est minime. Enfin dans un troisième secteur, à l'Est de la ville, fut découvert en 1989 et fouillé en 2008 un quartier qui a livré des activités de meunerie, de tannerie et de petit artisanat de tabletterie.

Les dieux et les morts

les dieux

On a retrouvé la trace de plusieurs cultes à Horbourg-Wihr; ils sont classiques et communs à toute la Gaule.

  • culte d'Apollon sous la forme d'un autel avec une dédicace sous une forme gauloise avec les adjectifs Grannus Mogounus;
  • culte de Mercure sous la forme d'un haut-relief mutilé dont le caducée ne laisse pas de doute sur la personnalisation et sous la forme d'une statuette en bronze;
  • culte de la déesse Victoire sous la forme d'un autel;
  • culte de la déesse Epona sous la forme d'une stèle où elle figure assise sur un cheval et tenant une pomme. Elle protégeait les voyageurs et les écuries;
  • culte à une déesse anonyme mais liée à la viticulture : sous la forme d'un bas-relief sur lequel elle est représentée assise avec, au dos de la pierre, deux génies ailés tenant des grappes de raisin, l'un marchant sur une hotte remplie de grappes;
  • culte des divinités du panthéon gallo-romain dans son ensemble : autel avec la dédicace de Martius Birrius.

les morts

La totalité des stèles funéraires exhumées à Horbourg-Wihr l'a été hors du contexte d'origine. Il en résulte que, jusqu’à des découvertes récentes, on n'avait aucune idée précise de l'endroit où devaient se trouver les nécropoles liées à l'agglomération.

Les stèles sont au nombre de vingt-quatre et presque toutes en grès rose. Bon nombre d'entre elles ont été découvertes réutilisées dans le rempart du castellum, d'autres l'ont été pour des sarcophages mérovingiens. Un certain nombre a été découvert dans un contexte ancien, inconnu ou incertain.

La localisation des nécropoles pose un problème évident car on ne peut compter que sur un nombre réduit de stèles localisées et les autres indices ne sont que très ponctuels. Cela s'explique en partie par la couche de limon qui recouvre le site et donc également les nécropoles, situées, comme le veut la tradition romaine, à l'extérieur de l'agglomération.

Partant de l'idée que les nécropoles sont pratiquement toujours situées le long des routes, on peut présumer trois secteurs propices:

  • à proximité de la voie du Kreuzfeld-ouest où une tombe du IVe siècle et une stèle funéraire en réemploi ont été découverts,
  • le long de la voie vers Biesheim où ont été trouvées deux stèles funéraires et des présomptions d'incinérations,
  • le long de l'éventuelle voie sud, du fait de la découverte en 1894 d'une tombe dans un jardin et, à proximité, une stèle funéraire.

D'autres tombes sont signalées sur le plan d'Herrenschneider mais il n'en donne aucune description satisfaisante.

La fin de l’Empire romain : la ville laisse la place à un castellum

Le camp occupe le centre du vicus antérieur, formant un îlot surélevé dans la plaine alluviale, enserré à l’origine par deux bras de rivière, à l’Ouest et à l’Est.

Les premières mentions de découvertes datent du XVIe siècle, à l’occasion des travaux d’agrandissement du château des comtes de Wurtemberg qui occupait déjà l’angle nord-est du camp. C’est l’humaniste Beatus Rhenanus qui relate en 1543 la mise au jour des premiers vestiges antiques et établit leur relation avec le toponyme antique Argentovaria ; cette assimilation a marqué le début d’une controverse entre érudits, controverse qui perdure jusqu’à nos jours

Au milieu du XVIIIe siècle J.-D. Schoepflin étudie le site au travers d’une analyse toponymique et  de la collecte d’éléments lapidaires, en 1780 le premier plan de l’enceinte est dressé par S. Billing, érudit colmarien, grâce à l’observation des fondations des fermes qui reposaient sur le rempart. Il faut cependant attendre les années 1820 pour que des remarques pertinentes soient proposées au sujet de la datation et de l’organisation probable du camp par Ph.-A. de Golbéry, auteur de la première monographie du site.

Enfin de grands travaux de fouille sont entrepris conjointement par le pasteur E.-A. Herrenschneider, et l’architecte des monuments historiques C. Winkler entre 1884-1894. Ces travaux ont permis de dresser un plan précis de l’enceinte, plan qui sert toujours de référence à l’heure actuelle.

A partir de 1964 l’équipe de M. Jehl et C. Bonnet s’est attachée  au site en mettant en lumière l’importance du vicus antérieur et en 1971-72 en opérant un sondage sur une portion du rempart oriental, malheureusement détruit par la construction du château médiéval a proximité.

En 1996 un nouveau sondage réduit a permis de dégager un tronçon bien conservé des fondations du rempart occidental. En 2004, la porte Sud du camp est dégagée avant des travaux de voirie, en 2010 un tronçon du rempart est détruit place du 1er février et en 2011, des éléments de la porte Ouest sont mis au jour par une tranchée de canalisation.

Description

Le camp reste toujours assez mal connu de nos jours faute de fouille récente d’envergure.

Le camp de Horbourg est un quadrilatère quasi régulier : 168,5 m x 160 m. L’ensemble occupe une superficie interne de 2,696 ha.

Le rempart devait être complété par un fossé. Si la distribution s’avère régulière, on peut compter 4 tours d’angle au 3/4 rondes, 8 tours intermédiaires demi-rondes et 4 portes rectangulaires au milieu de chaque côté.

Datation, problèmes historiques

La question de la datation

Faute de matériel, la datation du camp a longtemps posé problème et la question n’est, à ce jour, pas encore totalement résolue.

Les érudits des temps modernes ont longtemps considéré le camp comme une création précoce, augustinienne ! Ce n’est que vers 1820-1830 que Ph.-A. de Golbéry tient compte des éléments de réemploi insérés dans le rempart. Il observe notamment une inscription mentionnant Geta et  après réflexion sur les politiques de fortification de la frontière, propose une construction sous le règne de Julien. Après lui, et malgré le potentiel de leurs fouilles, Herrenschneider imagine un camp remanié et Winkler, plus éclairé, propose le IIIe siècle.

En 1918 R. Forrer  rapproche le camp de celui d’Alzey mieux documenté. C. Bonnet fait de même dans les années 1964-1972 lorsqu’il reprend la question, faute d’avoir une datation obtenue en stratigraphie.

Le camp se trouvait ainsi catalogué parmi les créations valentiniennes jusqu’au moment où la datation des référents (Alzey, Boppard, Kreuznach ou Yverdon) a été remise en cause.

Les dernières investigations de 1996 ont pu mettre en évidence un niveau qui pourrait être celui de la construction du camp et qui est daté du troisième quart du IVe siècle.

Le camp a vraisemblablement été abandonné par les autorités romaines au début du Ve siècle (après l’invasion alamane de 407 ?). Sa réutilisation au haut-moyen-âge est peu documentée à ce jour : un sanctuaire paléochrétien (VIe-VIIe siècles) est attesté avec sa nécropole. Il occupe une position centrale au camp, utilisant les fondations d’un bâtiment civil du vicus. (Le pseudo-praetorium de Herrenschneider).

La présence légionnaire

L’identification des corps d’armée occupant le castellum repose sur des découvertes anciennes et à ce jour seules quelques tuiles estampillées nous apportent quelque lumière. A la fin du XIXe siècle Herrenschneider découvrit lors de ses fouilles plusieurs marques de la Ière légion Martia, dont la présence est bien attestée dans la région pour la datation proposée. Des détachements de cette légion basée à Windisch (Suisse) sont aussi présents à Eguisheim, à Kaiseraugst et surtout à Biesheim.

Cependant il faut aussi remarquer la présence de deux estampilles de la VIIIe légion conservées au Musée d’Unterlinden à Colmar et dont l’attribution à Horbourg était douteuse jusqu’à ce que l’on retrouve récemment la mention précise de leur découverte dans la localité.

Le camp de Horbourg devait constituer un maillon clef de la défense en profondeur de l’espace rhénan au IVe siècle dont on retrouve plusieurs éléments dans la région et dont le site militaire de Biesheim-Oedenbourg joue un rôle de verrou avec Breisach pour contrôler le passage du Rhin.